J'ai raté mes études.
J'ai 36 ans et je suis toujours à
l'école. En CE1.
Oh, j'ai bien tenté de faire des efforts, mais
il faut se rendre à l'évidence: je vais passer les 30 prochaines années entre
les quatre murs d'une classe d'école primaire. Avec un peu de chance, je
finirai ma carrière d'éternel élève en CM2. Chez les grands. Pfiouu.
Depuis douze ans que j'ai choisi d'embrasser la
carrière d'instit' - plus par défaut d'ambition que par conviction - j'ai tenté
de m'extraire de ma misérable condition d'enseignant du primaire:
enseignant spécialisé en foyer d'ados, en collège et même directeur de SEGPA,
histoire de tutoyer le programme de l'enseignement secondaire tout en avalant
quelques couleuvres... Hélas, ces expériences plus ou moins heureuses m'ont mis
face à mes carences et, en particulier, à mon incapacité maladive à prendre du
recul. Quand l'on côtoie les fils et filles des damnés de la société
qui, eux-mêmes, engendreront d'autres damnés, il faut faire preuve d'un
détachement schizophrène. Bon, faut dire aussi qu'être provoqué, menacé,
insulté à longueur d'années tout en évitant la faute professionnelle,
c'est-à-dire démonter sa gueule à cet ado de 15 ans qui, non content de te
pourrir ton boulot depuis des mois, finit par te menacer tout en insultant ta
famille sur trois générations, ça finit par user un homme. Vous avez du mal à
me croire? C'est normal, la vérité est bien plus glauque. Ajoutez à cela des
locaux insalubres ainsi qu'un manque criant de pragmatisme de la part de la
hiérarchie, vous obtenez une belle dépression au bout de dix années. Oh,
j'entends déjà les discours des "bouffeurs d'instits" qui veulent
tout régler avec force torgnoles dans la gueule et beuglements de rigueur...
Sache, sombre trou du cul, que l'ado qui se retrouve face à toi n'en a que
faire de tes vagissements, lui, il s'est déjà bouffé des coups de godasses par
ses parents ou s'est retrouvé dans le placard à balais pour quelques nuits ou
bien encore a servi d'éteignoir à clopes. Alors, pour la baffe, tu repasseras.
Tu veux du glauque, du fait divers, de l'inspiration pour un remake Trash des
Misérables, fais un tour dans un foyer d'ados.
Bon, je suis pas là pour vous faire frissonner,
ni pleurer. Y'a déjà Nicolas et Angela "Pas Jolie" pour nous
paralyser. D'ailleurs, si, un jour, tu te sens vraiment trop heureux,
demande-moi quelques anecdotes sur ces années dans l'antichambre de l'enfer
social. Comme le Père Castor, j'ai du "Il était une fois..." à partager
sauf que là ça se termine pas par "Ils vécurent heureux et
eurent beaucoup d'enfants." mais plutôt par "Ils eurent beaucoup
d'enfants. En foyer.".
Cette année, j'ai réussi à atterrir dans une
petite école de campagne. À ce titre, il est nécessaire de casser quelques clichés
bien ancrés dans les esprits citadins qui me lisent (oui, toi!):
- Il y a "école de campagne" et
"école de campagne". La connerie et la misère ne sont pas des
privilèges réservés à la ville. Et leurs enfants sont tout aussi attachants...
aliénants plutôt. C'est comme si je m’amusais à comparer l'école
Notre Dame Réceptacle de la Sainte Semence à Neuilly-sur-Seine et
l'école Daniel Guichard de Sarcelles, toutes deux en banlieue parisienne. Tu
saisis la différence subtile?
- Non, les enfants de la campagne ne sont pas
tous très polis. Non, ils ne viennent pas en tracteur chaussés de bottes, un
béret sur la tête en hiver et un chapeau de paille en été. Non, ils n'ont pas
un brin d'herbe au bord des lèvres. Non, une fois que la cloche de la cour a retenti
- d'ailleurs, y'en a pas de cloche - à 16h30, les gamins ne jouent pas aux
cerceaux dans la rue ou ne vont pas au ruisseau du coin fabriquer un moulin à
eau avec la musique Herta en fond sonore. Non, ils ne parlent pas en roulant
les "r". Non, non et non.
- Nos cons de la campagne sont aussi cons que
vos cons de la ville. Si, si.
L'école où j'ai posé mon cartable est neuve. Pas
rénovée. Non, neuve. Magnifique, bâtie selon les normes HQE: chauffage par le
sol, très lumineuse, spacieuse, agréable quoi. Pour un premier poste en école
primaire, je dois dire que je suis bien tombé! Moi qui m'étais habitué au
"plus pourri que moi, tumeur" étant donné les doses de cochonneries
que j'ai pu inhaler dans les préfabriqués, hall d'usine aménagé en salle de
classe et collège pourri tapissé à l'amiante. Ça a vraiment de la gueule et je
dois dire que travailler dans des locaux neufs et confortables est bien plus
motivant que d'aller turbiner dans un bâtiment vieux et insalubre. La Palice,
sors de mon corps!
J'arrive donc ce 1er septembre 2011 dans ma
nouvelle école, j'aurai en charge le CE1 où 25 élèves y figurent. On m'annonce
d'emblée que, sur ces 25 marmots, deux nous sont gentiment envoyés par l'école
privée du village. 'Sont gentils les culs bénis, ils gonflent nos effectifs
pour nous aider à conserver les postes d'enseignants. Et que même, si ça se
trouve, ce sont deux très bons élèves calmes, polis et travailleurs. Avec des
parents attentionnés, souriants et serviables...
...
...
Que dalle, ouais!!! Une fois n'est pas coutume,
les culs bénis se débarrassent subtilement de la lie pour nous la
refourguer. "Ça remue trop, c'est nul, ça fait chier tout le monde? Pas
d'problème, y'a l'école publique!" Notez que cette tactique vaut également
pour le collège et le lycée, après, la sélection par le porte-monnaie est
suffisante. Attention, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit: il faut
quand même bien que l'on s'occupe de tous les gamins mais j'aimerais que les
écoles dites "libres" (sic, sic et re-sic), après avoir revendiqué
les mêmes droits que le "public" dans les années 80, aient les mêmes
devoirs d'accueil. Et c'est pas gagné...
Les deux gamins qui nous sont gentiment expédiés
par Colissimo administratif sont diagnostiqués
"hyperactifs". Et pour ne rien vous cacher, c'est du lourd! Jamais vu
ça. Du Taz sous amphétamine, jamais fatigué, toujours speedé.
Et ça, "c'est du sport", comme dirait
notre ami Gérard Holtz.
Je vous quitte momentanément et vous donne
rendez-vous pour l'épisode 2, épisode où nous ferons la connaissance des
énergumènes qui composent ma classe ainsi que des secrets de
l'Incroyable Hulkssard...
Voilà, maintenant que j'ai planté le décor, ne
me reste plus qu'à vous présenter les acteurs de cette comédie tragique (ou
tragédie comique, c'est comme vous voulez): premiers rôles, seconds rôles ou
figurants. Et moi, je suis le réalisateur, pieds et poings liés par la
production, j'ai nommé l'Éducation nationale... Le budget pour la saison
2011-2012 est toujours aussi rik-rak mais on nous demande toujours un maximum
d'audience. Pas facile de garder le public en haleine toute une année, et par
la même occasion, savoir se renouveler chaque année afin d'éviter la monotonie.
En ce qui concerne la monotonie, cette année, je risque pas de m'emmerder... Le
casting est exceptionnel.
Une classe est une micro-société où, sans cesse,
de multiples forces s'affrontent: le Bien et le Mal, la folie et la raison,
Gandalf et Saruman, Tom et Jerry. Et moi, misérable fonctionnaire au service de
l'état, je tente par tous les moyens de gérer ce microcosme, usant de dogmes,
faisant référence à la mythologie républicaine, maniant le verbe comme un
prêcheur dans sa chaire. Je suis omnipotent, omniscient. Je suis le Grand
Ordonnateur, craignez mon ire!
Il serait fort intéressant d'étudier la
sociologie d'une classe, décrire les différentes interactions qui s'y nouent
ainsi que les fragiles équilibres que l'instit' tente tant bien que mal de
préserver. C'est un dur labeur. Dieu n'est pas un boulot de tout repos.
Une bonne vingtaine de marmots de 6 à 8 ans
compose ma classe. Certains types de caractères sont aisément transposables
d'une classe à l'autre. La grande difficulté est de réussir à marier ces
caractères dans une subtile alchimie qui mènera tout ce petit monde - et
moi-même - au Nirvana pédagogique... Compulser des traités d'alchimie médiévale
ou relire L'art de la Guerre de Sun Tzu peut se révéler utile tant la capacité
à associer les individus, à les motiver ou à combattre leurs penchants
destructeurs est une qualité primordiale dans la gestion du Monde-classe.
Dans ce combat contre le Chaos, je peux
m'appuyer sur un trio d'élèves entièrement voués à leur dieu, c'est-à-dire bibi.
LES ÂMES PURES (courage: 9,
intelligence: 9, charisme: 7, adresse: 7, force: 5): bons éléments, ma parole
fait force de loi. Ils ne rechignent à aucune tâche et en redemandent. Même les
plus ingrates. Il est nécessaire de les freiner car ils sont capables de vous
nettoyer un tableau à coups de langue, de vous filer la moitié de leur goûter à
chaque récré ou de contredire leurs parents pour faire plaisir au Maître. Ils
sont une référence implicite, le reste de la classe les respecte mais malheureusement
leur exemplarité n'essaime que très peu parmi mes ouailles. Gloire à eux. Ou à
elles plutôt, car 2/3 de ces âmes sont de sexe féminin.
Derrière ce trio s'agglutine une dizaine de
suiveurs positifs qui, tant bien que mal, tentent de conquérir mes faveurs.
Maladroitement certes, mais faut-il vraiment s'en plaindre? On y trouve, entre
autres, ce que l'on appelle communément les fayots.
LES FAYOTS (courage: 7,
intelligence: 7, charisme: 4, adresse: 7, force: 5): pas mauvais mais pas
transcendant, le fayot est attachant parfois, agaçant souvent... Il veut être
adoubé mais n'y arrive pas. Il redouble d'efforts en vain. La délation est son
arme favorite. Je dois avouer que, mon omniscience ayant se limites, j'ai recours
à cette catégorie d'élèves afin de résoudre conflits, vols et disparitions. Si
j'avais été Louis XIV, sûr que je n'aurais pas manqué de Valets-de-pisse.
LES MÉDIANS : par définition, le
ventre mou de la classe, très hétérogène. On y trouve:
- Le cosmonaute
(courage: 2, intelligence: 8, charisme: 1, adresse: 2, force: 2): il plane,
surfe sur les limbes éthérées de son insouciance. Je le soupçonne de secréter
naturellement des substances hallucinogènes. Capable de prendre son cartable
pour aller en récréation, de l'oublier pour rentrer chez lui. Je m'inquiète le
jour où il n'oublie pas de prendre son goûter en récréation. C'est un rituel
chez lui. Si je n’étais qu'un observateur, son attitude serait amusante voire
hilarante, or, je suis enseignant et il ne s'agit pas de chômer! Faut du
rendement, nom d'une pipe! Alors, quand je le surprends à mimer l'éléphant, sa
trousse lui servant de trompe, j'ai un peu de mal à rester stoïque... Surtout
que je me trouve à 50 cm de lui, collant dans son cahier les multiples feuilles
volantes qu'il a omis de classer. Pendant une seconde, les épaules basses, le
regard tourné vers mes souliers Décathlon (eh oui, l'instit' s'habille chez
D4), j'implore Saint Jules Ferry. "Donne-moi la force, Jules. Résiste,
prouve que tu existes!". Résister à l'envie de lui prendre sa trousse, de
sauter à pieds joints dessus tout en proférant des insanités que la morale
réprouve. Ce n'est pas tant ses capacités cognitives qui le pénalisent,
d'ailleurs il sait faire preuve de fulgurance, mais son incapacité à suivre le
mouvement. Il est en apesanteur, il est heureux. Bon, finalement, je l'aime
bien, ça fait de belles anecdotes à raconter...
- Le chouineur
patenté: (courage: 7, intelligence: 8, charisme: 3, adresse: 3, force: 5):
fils à maman, le chouineur patenté a développé une tactique de défense
extrêmement efficace en milieu familial. Qu'un obstacle apparaisse sur sa
route, qu'une difficulté l'empêche de mener un travail à terme ou qu'il soit
pris en flagrant délit de mensonge ou de bêtise enfantine, le chouineur se met
immédiatement à chouiner, geindre voire brailler. Ça marche avec les parents,
la famille. Au poil.... Mais pas avec moi. Attention, mon but n'est pas de le
brusquer ni de le traumatiser, mais de lui faire prendre conscience que le
cocon familial a ses limites et que, plutôt que de verser des larmes de
crocodile sur son cahier du jour, il ferait mieux de se mettre illico presto au
turbin avant que l'envie de lui décoller la pulpe du fond me submerge et
emporte les digues de conscience professionnelle dressée face à ma fureur
bestiale. Dans une série mélodramatique genre "Rendez-moi mon chien
tétraplégique car je suis autiste et orphelin", il y trouverait sa place:
regard de chiens battus, yeux humides et scintillants, lèvre inférieure qui
frémit annonçant l'arrivée imminente d'un beuglement déchirant et oreilles
rougissantes, signe distinctif du gars qu'a quelque chose à se reprocher. De
l'Actor's Studio, j'vous dis! Bon, ce n'est pas ça le plus dur...
L’affrontement titanesque avec la génitrice est autrement plus délicat à
appréhender: je suis l'ogre dévoreur d'enfants sans défense. Un sourire,
quelques arguments bien placés et hop, le boss de fin de niveau est renvoyé dan
son antre!
- La pipelette
(courage: 8, intelligence: 7, charisme: 8, adresse: 7, force: 3 à 8) : Un
moulin à parole. Toujours quelque chose à dire, même quand on ne lui demande
rien. Usante, éreintante, éprouvante, la pipelette érode méthodiquement ma
patience. Incapable de se taire plus de trente secondes, se sent obligée de
tout commenter. Et quand je dis tout, c'est tout! Une mouche qui vole, un avion
qui passe, un silence un peu trop long à son goût, la pipelette est une
terroriste qui s'ignore. Or, je ne négocie JAMAIS avec les terroristes! Tel un
sniper sur les toits, je distribue les sanctions qui devraient, théoriquement
stopper sa logorrhée... Théoriquement. Que nenni, la pipelette est une zombie,
un vampire, une créature des Ténèbres! Impossible de l'arrêter à moins de lui
dégommer la gueule à coups de fusil à pompe. Impossible d'y échapper. Qu'on se
le dise.
Après avoir abordé les quelques portraits
d'élèves qui font qu'une classe est un lieu vivant et attractif, je vais
dresser quelques portraits d'élèves dont le comportement génère en moi des
poussées de fureur frénétique, et dont l'attitude a l'effet d'un shoot à
l'adrénaline pure. J'ai nommé LES PLAIES D'ÉGYPTE:
- Attila
(courage: 3, intelligence: 7, charisme: 5, adresse: 10, force: 10): où il
passe, le matériel scolaire trépasse. Rien ne lui résiste. Règles, ciseaux,
crayons, gommes, etc. subissent sa force de destruction. Il mâchouille,
triture, râpe, découpe, cisaille, éventre, ribambellise tout ce qui passe à sa
portée. Sa table est un champ de bataille, sa trousse un charnier. L'horreur se
lit sur mon visage à chaque fois que j'ai la force de faire le bilan des morts
et blessés. Des bics décapités, des gommes dynamitées, des crayons scarifiés,
c'est le festival du film gore. "Massacre au taille-crayon", "Les
Dents de la Mer version bac à sable", "Freddy en culottes
courtes" pourraient illustrer ses multiples méfaits.
- Tarzan
(courage: 1, intelligence: 9, charisme: 2, adresse: 8, force: 9): Mon premier
hyperactif (reconnu par des psys), la classe est sa jungle dont il est l'hôte
principal. Il ne saisit que de très loin l'utilité d'une chaise et de ses
quatre pattes. En équilibre instable permanent, il se complaît à trouver les
positions les plus périlleuses et improbables, quelle imagination! Le Cirque du
Soleil a une recrue de choix. Évidemment, il se casse la gueule deux ou trois
fois dans la journée avant que je lui confisque, à regret, sa chaise. Oui, à
regret, car, n'ayant plus de chaise à sa disposition, donc d'un objet lui
indiquant relativement précisément où il doit se situer, il se sent libéré de
son carcan mobilier et se met à explorer les alentours de sa table. Niveau
boulot, Tarzan a le niveau de Cheetah. Loin d'être stupide, son hyperactivité
l'empêche de se concentrer durablement, c'est-à-dire plus de cinq minutes
d'affilée... Sachant qu'une journée d'école comporte six heures d'enseignement,
je ne vous cache pas que le rendement est assez faible.
- La concierge
(courage: 4, intelligence: 8, charisme: 8, adresse: 5, force: 9): Elle est à la
pipelette ce que Iron Man est à Nono le robot. C'est la voix "off" de
la classe, on la croirait grand reporter à commenter ou réagir à n'importe
quoi. Qui plus est, avec un volume sonore qui croit exponentiellement au cours
de la journée! Mon agacement aussi d'ailleurs...
- L'hyperactif de
classe mondiale ou "no limit" (courage: 1, intelligence:
2, charisme: 10, adresse: 10, force: 10 – Un Troll de montagne quoi…): Il ne
craint rien, ose tout. Anarchy in the classe! No future. Un seul credo:
"Une règle est faite pour être enfreinte", un objectif unique:
attirer l'attention sur sa personne. C'est une chimère, il a réussi à fusionner
la concierge, Tarzan et Attila en une seule personne: un Super Sayen en
quelque sorte. Équilibrisme, anéantissement du matériel et enquiquinage n'ont
plus de secrets pour sa petite personne. C'est un vampire qui se nourrit de
l'agacement d'autrui: si tu l'ignores, il redouble d'inventivité, si tu essaies
de le contrôler un tant soit peu, il monte en pression jusqu'à éclater dans un
feu d'artifice visuel et sonore. C'est mon super virus à moi, je dois le
confiner le plus longtemps possible car il se révèle extrêmement contagieux. Si
la concierge s'en mêle, les pipelettes en profitent, Tarzan saute de table en
table et Attila exprime son extrême nervosité en égorgeant sa gomme ou en
équarrissant deux ou trois crayons de couleur qui ne demandaient rien à
personne. Un festival pyrotechnique, son et lumière, le Puy du Fou, c'est une
kermesse de village à côté de ça.
Une troisième catégorie regroupe LES
INCLASSABLES. Je ne sais quoi en penser. Existent-ils? Ont-ils conscience
de leurs actes? Me comprennent-ils? Do you speak english?
- L'hypoactif ou
hyperinactif (courage: 1, intelligence: 1, charisme: 1, adresse: 1, force:
1): c'est l'antithèse du "no limit", son espace-temps est
différent du nôtre. Une journée pour lui, c'est un battement de cil. Sa
production est nulle. il s'assoit, prend racine et ne réagit que très peu aux
stimuli extérieurs. Saisit-il mon langage? C'est une question légitime. À la
question suivante: "Combien font 4 + 7?", il est capable de
répondre "rouge"! Ou "vert". C'est suivant
son humeur. Sa capacité de concentration est extrêmement limitée: elle ne
dépasse pas 5 secondes (véridique!). Non pas qu'il ne veuille pas exécuter la
tâche requise mais passée cette fatidique cinquième seconde, il oublie tout
simplement et son cerveau fait un "RESET" général et est disponible
pour autre chose.
Il a une bonne tête,
mignon comme tout, de grands yeux remplis d'amour, c'est mon Petshop à moi.
- David Copperfield
(courage: 5, intelligence: 9, charisme: 5, adresse: 10, force: 5): Comme son
nom l'indique, c'est un magicien. Mais il ne le fait pas exprès. Il a la sale
manie de perdre tout ce qu'on lui confie: crayons, gommes, stylos, cahiers,
etc. Il doit être le détenteur d'un superpouvoir mais, malheureusement, ne sait
pas s'en servir; je l'enverrais bien rencontrer le Professeur Charles Xavier
afin qu'il maîtrise son fabuleux pouvoir de disparition (de téléportation?). Ou
bien est-ce pire...
Générerait-il de
mini-trous noirs dans lesquels disparaît à tout jamais du matériel
scolaire? J'imagine la gueule du Docteur Spock lorsqu'il va se manger un
taille-crayon MAPED dans le réacteur nucléaire de son USS Enterprise. Sorry,
Doc!
Voilà en quelques lignes, la faune qui vit au
sein du Monde-Classe. Chacun y trouve une place. Du haut de mon estrade
"Olympe", j'observe ce petit monde grandir et mûrir au rythme des
erreurs et réussites de chacun. Mes disciples lisent l'avenir dans leur cahier
de texte et tentent d'apaiser mon courroux en m'apportant des offrandes
"coloriages". J'y réponds à coups de "bon point" lorsque le
cœur m'en dit...
La vie et l'ambiance d'une classe ne se résument
évidemment pas à la somme des individus qui la composent. Heureusement. J'ai
énormément de tendresse pour ces gosses qui me font exister en tant que maître
d'école même si la gestion d'un groupe de mioches n'est pas de tout repos. Je
donne une représentation tous les jours, je joue. Comme un gamin.
Je suis un gamin qui joue à faire le grand.
Rag'
PS: Je ne vous ai
toujours pas présenté la bête qui sommeille en moi, ça ne saurait tarder...
d'aucuns croiraient que c'est exagéré...Mais c'est tout à fait ça !! continuez,dans ce registre, ça permait de se "lâcher" par personne interposée et en plus, j'adore !
RépondreSupprimerMerci Lou pour ce petit commentaire qui m'encourage à continuer sur cette voie de l'auto-dérision.
SupprimerÀ bientôt pour de nouvelles chroniques!
Rag'
rien à dire, tout y est ... chacun de nous retrouve sa classe et doit se sentir d'un seul coup... moins seul ! J'adore le style, très agréable à lire... ça fait longtemps que je n'avais pas ri à la lecture d'un texte sur l'école !!! Merci et surtout, n'arrêtez pas !!!
RépondreSupprimerMerci beaucoup pour ce petit mot. Être reconnu par ses pairs est une satisfaction sans égale.
SupprimerÀ bientôt pour la suite de mes (nos) aventures!
Un grand bravo de la part d'une maman qui reconnait non seulement ses enfants mais beaucoup plus les enfants des autres (oui ceux des autres sont toujours les pires c'est bien connu^^). Je vous souhaite énormément de courage, et surtout continuez d'écrire.
RépondreSupprimerMerci beaucoup chère maman. Votre mission sera donc de diffuser cette adresse autour de vous. Ainsi, quelques poncifs sur le métier d'enseignant seront, je l'espère, battus en brèche. Enseignants/Parents, mêmes intérêts! Malheureusement, certains ne l'ont toujours pas compris...
SupprimerEnseignante en école privée, je ne me considère pas comme un " cul béni" car c'est par hasard que j'y suis entrée.....et j'y accueille aussi des hyper-actifs,des pipelettes, des chouineurs,des cosmonautes, fayots et autres créatures si bien décrites dans votre prose! Ce regard un peu acide, moi aussi je le partage à de nombreux moments et il faudrait presque distribuer ce texte aux parents à la rentrée pour qu'ils comprennent enfin que leur enfant n'est pas tout seul dans la classe!!!
RépondreSupprimerEt puis, un enfant arrive un matin avec une rose et un sourire, et là on comprend dans son regard pourquoi on se lève chaque matin!
Merci Flo,
SupprimerCe que je décris ici est MA réalité vue à travers le prisme déformant de mon esprit retors.
Loin de moi l'idée de relancer la guerre entre "culs bénis" et "culs salés", néanmoins les préjugés parmi les parents d'élèves sont légion...
Chère collègue, à bientôt sur ce blog. Je l'espère.
Rag' Yann
Maman, grand mère, j'ai bien ri, rire ne veut pas dire se moquer,je reconnais mes enfants (4) dans vos élèves, de temps en temps l'un, de temps en temps l'autre.
RépondreSupprimerJe reviendrai pour des nouvelles de votre classe.
Courage et merci pour votre patience, (je n'ai pas assez soutenu les instits et les profs de mes enfants alors...)
Merci beaucoup pour ce petit commentaire bien agréable par les temps qui courent!
SupprimerEt ça fait toujours plaisir de toucher de nouvelles lectrices et nouveaux lecteurs.
Faites tourner!
Bonsoir !
RépondreSupprimerJ'atterris chez vous en passant par le blog d'une copine qui nous conseillait la visite ... je ne regrette pas, je viens de pleurer de rire toute seule devant mon écran, et c'est plutôt rare à propos de l'école ces temps-ci (j'ai plutôt tendance à pleurer de rage en ce moment) ...
Alors, je suis d'une famille de profs, fille d'instit (véritable hussard, celui-là), et j'ai moi-même failli intégrer la grande famille avant de faire demi-tour in extremis quelques mois avant les concours (saisie de frayeur à l'idée de finir ma vie derrière des barreaux après avoir occis un ou deux élèves, ce que j'aurais certainement fini par faire) ... et je me suis rabattue sur les bibliothèque, où la vie est beaucoup moins mouvementée ... et puis, depuis septembre, je suis passée de l'autre côté de la barrière puisque mes gremlins sont rentrés à l'école ... et j'imagine bien ma fille dans le rôle de la pipelette, dans quelques années ... même si pour l'instant, c'est plutôt dans le cercle privé, en public, elle reste collée à son frère et l'imite en tous points ...
Et puis, je m'occupe aussi de l'aide aux devoirs dans l'école de notre village (où je n'ai encore vu personne arriver en tracteur ...) et c'est fou comme une classe en miniature ressemble à une classe standard ...
Bref, je ne vais pas vous raconter ma vie, mais en tous les cas, merci pour cette bonne tranche de rigolade, et je vais de ce pas tenter de m'abonner à votre blog pour ne pas rater la suite ...
Et je vais m'empresser de diffuser votre adresse auprès de tous les affreux profs, instits et autres suppôts de Satan, pardon, de l'Education Nationale, qui m'entourent ...
Bonjour Lisbei!
SupprimerMerci pour ce long commentaire qui prouve que je ne suis pas totalement à côté de la plaque!
Heureux que vous vous retrouviez à travers ma prose. Loin de la moquerie, mon humour tend à dédramatiser ces petites expériences, cela me permet de digérer les aléas du métier.
Au plaisir de vous revoir sur mon blog! Et surtout, faites tourner! Et lisez les précédents billets, y'a aussi du croustillant... La cantine par exemple.
À bientôt, chère lectrice!
Yann
PS: C'est quoi le blog de votre copine?