lundi 1 novembre 2010

Le kiné m'a niqué...

Il est une activité où j’excelle - j'exagère peut-être un peu - c'est celle de relater de petits faits de la vie quotidienne qui, en apparence, pourraient passer inaperçus voire provoquer la somnolence. Par chance, le prisme par lequel j'entrevois les choses me permet de me créer une vie un peu moins terne qu'elle ne l'est réellement. Du moins, ça fait marrer mon auditoire. Ou les lecteurs. 
Pour celles et ceux qui suivent un peu mes péripéties, ce n'est pas un secret de dire que la Chance et moi, on se croise pas souvent.J'aimerais quand même qu'elle m'oublie pas trop. Après, on va me dire que la chance, ça se provoque, ça se mérite... Mouais, primo, je suis pas un provocateur, secundo, faudra qu'on m'explique comment ça se mérite! Faire deux mille pompes, bouffer une mygale, regarder Secret Story plus de trente secondes? Dites-le moi, ou taisez-vous à tout jamais. Nom d'un Carambar!
Donc, il y a quelques semaines, suite à une énième visite chez le toubib, me furent prescrites quelques séances de kinésithérapie. Ne désirant plus me taper des dizaines de bornes et minutes en bagnole pour rencontrer mon kiné habituel, j'ai décidé de faire confiance à un kiné du bled d'à côté dont on m'avait dit pas mal de bien. Bon, rien de bien formidable mais il était jeune, débutait dans la carrière et était sportif. Cela me suffisait. D'autant plus que mes pépins physiques récurrents m'avaient amené à ressentir un certain ras-le-bol et à perdre confiance en la kinésithérapie... Quitte à perdre son temps, autant ne pas trop en perdre en bagnole!
J'arrive donc pour mon premier rendez-vous. Pas vraiment guilleret, je n'attendais pas de miracles, mais quand même impatient de rencontrer une nouvelle tête et, ô espoir improbable, peut-être tomber sur un kiné hyper compétent encore méconnu et à deux pas de chez moi...
Cinq minutes en bagnole et je trouve le bâtiment où se trouve le cabinet. Le bâtiment, neuf, est accueillant et y travaillent un podologue (un vrai ou un coupeur d'ongles incarnés doublé d'un brûleur de verrues pour Papis et Mamies arthritiques?), une esthéticienne, trois infirmières (à poil sous leur blouse, parait-il) et le fameux kiné qui pratique en compagnie d'un autre acolyte.
J'entre dans le cabinet qui se trouve être une vaste salle où de nombreuses personnes sont occupées à pousser, tirer, soulever de multiples objets ou sont branchées sur Compex. Première impression: c'est un peu le bordel...
Je me présente, le kiné m'accueille et, d'emblée, me semble un peu débordé. Il ne trouve pas de tables ou de box où je pourrais m'installer. Commence alors un étrange jeu de chaises musicales... Et voilà que Mamie Tremblote doit quitter la table pour la cabine 1 et que le gars au genou droit "électrodé" doit sautiller pour atteindre la chaise libre. Je lis dans les yeux du kiné la panique du gars qui doit trouver une solution assez rapide sous peine de subir foudres ou railleries... Je connais ce regard. Je l'ai souvent...
Trente secondes plus tard, je suis assis sur une table de massage. J'explique ce qui ne va pas, ou essaie plutôt d'expliquer... C'est compliqué et le diagnostic n'est toujours pas tombé, même deux toubibs et deux ostéos s'y sont cassés les dents.
"J'ai mal là, mais pas là et ça passe par ici et repasse par là, il court, il court, le bobo...", autant dire que le kiné me regarde avec des yeux de merlan frit et doit se dire "merde, pourquoi il vient ici, le névrosé?i'pouvait pas venir avec une bonne vieille entorse, ce con?". Il tâte, palpe, masse la région concernée (jambe droite, bas du mollet, tendon d’Achille, talon) et pose les questions habituelles: "t'as mal là? Et ici? et là? Et quand je fais ça? Et quand je lèche ma jambe gauche et touche mon nez avec mon oreille droite, tu ressens quelque chose?". Bon, en un mot comme en cent, il sait pas, il fouille, il essaie de trouver l'ouverture. Celle qui lui permettra de ne pas perdre la face, de se convaincre qu'il n'est pas si mauvais que ça et qu'il n'ira finalement pas se jeter sous les rails d'un train dont la gare se situe à moins de cent mètres de son lieu de travail. Véridique! Pour la gare.
Et à un moment, je ne sais pas ce qui lui a pris, il s'est mis à me masser fortement l'intérieur du talon. "Ouille", dis-je calmement. Ma réaction a eu l'air de lui plaire et il a redoublé d'efforts sur cette zone de mon talon. "Ça fait mal?" me demande-t-il. "très mal?". J'opine du chef autant que possible car trop occupé à me mordre la main de douleur. Je retiens un cri, un hurlement car, à ce moment-là, je manque de glisser de la table tellement le massage est douloureux! Je ne proteste pas, fier que je suis. Je me dis que c'est normal, que cela doit être un de ces "massages profonds" qui font du bien là où ça fait mal et je me remémore la devise Shadok « Si ça fait mal, c'est que ça fait du bien. »
Je serre les dents, étouffe un geignement, mes yeux sont exorbités, la sueur me coule aux tempes. Putain que j'ai mal!
Cinq bonnes minutes passent avant qu'il ne daigne stopper le supplice. Pour mieux reprendre avec son coude! Il est vrai que le coude, c'est plus dur que le pouce et que l'on peut appuyer beaucoup plus fort; alors pourquoi s'en priver? Je suis à la limite de l'explosion, je mobilise toute ma force spirituelle pour me convaincre que la douleur n'est qu'une information comme une autre, qu'elle finira par s'atténuer à un moment ou à un autre!
Que nenni! Je souffre en silence. Vingt secondes, trente secondes, une minute, une minute cinq secondes,... Le temps s'étire, le sablier du temps ralentit inexorablement. J'ai mis le chronomètre de ma vieille montre D4 en route depuis le début de la séance et j'ai la certitude de pouvoir lire les dixièmes de seconde défiler voire les centièmes... Que c'est long!
Prenant mon courage à deux mains, j'arrive à murmurer quelques mots dans l'espoir fou de détourner son attention: "est-ce ..... gnnnnniii.... normaaaaaaaal d'avoirrrrr mal là quand vous appuyez làààààhah?"
Un spasme imperceptible vient d'apparaître sur son visage. Le doute... J'ai jeté le doute dans son esprit. Pourquoi ne l'ai-je pas fait plus tôt? Il cesse son triturage, rabotage, labourage, forage de mon talon et se fend d'un "euuh, mmmmmmm, (il se racle la gorge) je vais quand même voir si, de l'autre côté, ça fait la même chose....".
Je suis en rémission pour quelques secondes au moins, ouf! Et s'il s'était planté.... Il saisit ma jambe opposée, s'applique une nouvelle fois à me démonter la face interne du talon de la dite jambe et réitère sa question favorite: "ça fait mal? Plus, moins, autant?". On dirait un jeune puceau qui fouraille pour la première fois sa dulcinée: "t'as mal, là? Non? À droite, à gauche? Plus loin?".
Mais bordel de merde! OUI, QUE ÇA FAIT MAL AUSSI, T'APPUIES COMME UN MALADE SUR LES LIGAMENTS!!
Ma patience a des limites, tout comme ma résistance à la douleur, inutile qui plus est. La vérité éclate: il m'a explosé les talons pour que dalle! Viens ici mon bonhomme, que je te masse la gueule à grands coups de barre à mine. Tu vas me dire si ça fait mal ou pas. T'as mal au crâne? Approche-toi que je te manipule les globes oculaires avec les cuillères à pamplemousse, tu lèves le bras si tu sens quelque chose, hein? N'hésite pas...
Purée, le voilà comme un con, le regard posé sur mes talons, évitant de croiser mon regard embué par les larmes de douleur et de rage, une fois de plus, sa moue dubitative trahit son incertitude, sa gêne. Il bredouille quelques mots et s'en va chercher un électrostimulateur. Je suis pris de panique. Et s'il me branchait sur la gégène? Et s'il voulait me frire les roubignoles au Compex? Et s'il était le digne héritier du Marquis de Sade?
Qui sait?

Toujours est-il qu'en moins de trente minutes, ma confiance en cet inconnu a fondu aussi vite qu'un glaçon sur les fesses d'Eva Mendez.

Bon, voilà où j'en suis. Je crains la prochaine séance. Va-t-il ma masser le dos à coups de rangers, me faire un petit "palper-rouler" avec un fer à repasser, me brancher sur du 380, histoire de tester ma résistance à la douleur? Suis-je tombé entre les mains de l'arrière petit-fils de Josef Mengele? L'avenir (si j'en ai un) me le dira...

J'ai peur... J'ai mal au talon.

3 commentaires:

  1. et alors ???? il t'as pas massé avec le genou après ??? C'est encore mieux avec le genou j'ai entendu dire, quand les os commence à craquer et se broyer les uns contre les autres. Trop bon !!! Tu verras la prochaine séance. Que du bonheur !!! mmmmmmmmmmmmm !!!!!

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  2. Une seule solution : tu ne te lave plus les pieds jusqu'à la prochaine séance et tu marches dans une merde juste avant.

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  3. Tu vas morfler chez ce bourreau !!!
    J'espere pour toi, que la ligne sncf est toujours en service, c'est ta seule chance d'en sortir vivant...
    Bonne chance pour la suite

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